La neige, subsistante, forme d’étranges rigoles, zébrant les flancs de Manse. Elle suinte en bandes obliques, délimitant stries blanches et larges tronçons bruns. N’allez pas croire pourtant qu’il s’agisse d’une ré-agglutination, quand c’est plutôt ici un effet de la fonte.
Au-dessus, claquent les sommets du Champsaur, hauts réflecteurs de lumière. Ils brandiront tout ce blanc encore longtemps, au-delà de la saison chaude.
Mais là n’est pas notre sujet. Récusant leur éminence, cette verve grandiloquente qui s’attache souvent à eux, nous avons élu un modeste, pour sa forme et sa situation manifestes !
Que peut une composition de mots, face à une montagne de pierres et d’herbes, à la matière muette, aussi humble que mystérieuse ? Le Manscrit est une proposition de réponse en acte à cette question : d’abord, le texte prend l’aspect d’une promenade autour et sur une petite montagne des Hautes-Alpes. Mais vite, c’est un corps à corps méthodique et joyeux qui se met en branle. Olivier Domerg, avec une opiniâtreté nimbée de facétie, convoque toutes les ressources du poème pour épuiser, faire passer dans la langue et célébrer le Puy de Manse dans un véritable gai savoir poétique.
À la fois sérieux et léger, Le Manscrit se déploie, avec méthode, dans trois dimensions du poème qui se complètent et se répondent, toujours identiques mais variant de focale au fil des épisodes : la prose, la note et le chant.