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Ana Viola

Eugénie Favre

ISBN: 9782914033992
244 pages
145 x 215 mm

24,00 

Chère Ana-Viola,

L’écriture s’adresse à quelqu’un.
Cela se situe donc dans les parages d’une vieille oralité et d’une destinée amoureuse des choses.
Mais alors qui s’adresse à qui ? Et qui hante qui ? Et cela fait quoi d’être une allégorie, un piège à clés à nœuds narratifs ?
J’ai fait de toi un trans-personnage : Déesse des drifts, Archidémon, Poupée industrielle, Beauty Leary, Renarde de Teumesse, Zeitghost… Désolée, j’ai joué avec toi.
Il y avait une ligne temporelle et un terrain géologique où t’insérer et planquer une intrigue avec 3 autres personnages. Je sais, c’était réducteur de te comparer à une pierre imaginaire dans mon musée imaginaire. Alors j’ai tourné autour de toi pour obtenir un récit puis j’ai tourné autour du récit pour obtenir de la poésie. À travers toi j’ai testé la persistance possible du personnage et sa possible dimension affective et sauvage. J’ai créé du sens en tous sens. Parfois je crains de t’avoir réduite à un Dummy Crash testant la place de l’épopée dans notre époque.
Pourtant tu sembles si réelle dans le jardin de Tresco, dans la baie de Rye ou au cap de Dungeness. Sur les pages noires tes rêves et vos rêves de personnages semblent plausibles. Même l’actrice qui a trouvé ton journal dans un hôtel de Winchelsea Beach semble vivre d’une réalité parallèle.
Et cette fois unique sur le bateau qui quittait St. Mary’s pour Penzance. J’ai tout tenté, il n’y avait aucune description possible, même tes habits n’apparaissaient pas.
Tu étais en quelque sorte dans ma tête, comme une obsession repliée sur elle-même.
Nous sommes constamment débordés par le réel, nous sommes constamment occupés à transmettre des choses. Nous sommes mais c’est toi l’héroïne occasionnelle et cela a beau être une histoire, c’est toujours une histoire de langage donc nous nous adressons encore des choses par-delà l’immobilité.

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